L’union européenne surveille le vitrage automobile
Saint-Gobain annonce son intention d’engager un recours contre l’amende record de 896 millions d’euros que lui a infligée la Commission européenne pour entente dans le verre automobile.
La Commission européenne avait auparavant annoncé des amendes pour un montant total d’environ 1,4 milliard d’euros concernant les entreprises Asahi, Pilkington, Saint-Gobain et Soliver pour avoir conclu « des accord illicites de partage de marchés et échangé des informations commercialement sensibles concernant des livraisons de verre automobile dans l’espace économique européen (EEE) ».
Saint-Gobain, qui avait provisionné un montant de 560 millions d’euros à la fin de l’exercice 2007 pour l’amende de la Commission, a annoncé dans un communiqué prévoir « d’engager un recours devant le Tribunal de première instance de Luxembourg à l’encontre de cette décision, qui lui apparaît manifestement excessive et disproportionnée ».
« Le montant de cette amende représente environ 95% du chiffre d’affaires annuel de l’activité OEM (Original Equipment Manufacturer) de Saint-Gobain Vitrage automobile en Europe, et plusieurs dizaines d’années de son résultat net », a souligné le numéro un mondial de la production et de la distribution des matériaux de construction.
Saint-Gobain a également rappelé que la procédure de recours était suspensive du paiement de l’amende jusqu’au jugement du Tribunal moyennant la remise d’une garantie bancaire.
« Entre début 1998 et début 2003, (Asahi, Pilkington et Saint-Gobain) se sont consultées sur les prix cibles, le partage de marchés et la répartition de la clientèle à l’occasion d’une série de réunions et d’autres contacts illicites. L’entreprise belge Soliver a également pris part à certains de ces échanges », a indiqué la Commission dans un communiqué.
Elle a ajouté que les quatre entreprises en cause contrôlaient à l’époque environ 90% des ventes de verre utilisé dans l’EEE pour les véhicules neufs ainsi que pour les pièces de rechange d’origine destinées aux véhicules automobiles, marché qui représentait quelque 2 milliards d’euros la dernière année complète de l’infraction.
La Commission a majoré l’amende infligée à Saint-Gobain de 60% pour cause de récidive tandis que Asahi, qui a « fourni des informations complémentaires qui ont permis de révéler l’existence de l’infraction », a bénéficié d’une réduction de 50% du montant de l’amende.
Il s’agit des amendes les plus élevées que la Commission ait jamais infligées dans une affaire d’entente, tant à une seule entreprise – Saint Gobain en l’occurrence – qu’à l’ensemble des membres d’une entente.
« Le montant total des amendes est élevé en raison de l’étendue du marché, de la gravité de l’affaire et des infractions commises antérieurement par Saint-Gobain. L’importance des amendes infligées par la Commission s’explique par le fait que cette dernière ne peut et n’a pas l’intention de tolérer les comportements illicites de ce genre », a déclaré Neelie Kroes, commissaire européen à la concurrence, citée dans le communiqué.
Benjamin Mallet, avec la contribution de Julien Toyer à Bruxelles, édité par Jean-Michel Bélot et Le Point
La Commission Européenne poursuit son combat contre les cartels avec l’annonce mercredi d’une amende record de 1,38 milliard d’euros pour quatre fournisseurs de verre à l’industrie automobile, dont Saint-Gobain qui paye très cher ses récidives.
Le groupe français va devoir verser à lui seul environ les deux-tiers de la somme, soit 896 millions d’euros. Son amende a été majorée de 60% pour cause de récidive, le groupe ayant déjà été condamné trois fois pour cartel ces dernières années.
L’amende collective de 1,38 milliard d’euros est « la plus grosse amende jamais infligée à un cartel en Europe », a souligné mercredi la commissaire à la Concurrence Neelie Kroes lors d’une conférence de presse.
Le précédent record revenait jusqu’ici au secteur des ascenseurs, qui avait dû s’acquitter l’an dernier d’un total de 992 millions d’euros dont presque 480 millions pour l’allemand ThyssenKrupp.
Saint-Gobain est accusé de s’être entendu pendant cinq ans, de début 1998 à début 2003, avec trois autres producteurs, pour fixer les prix et se partager le marché du verre pour l’industrie automobile.
Les pare-brise, fenêtres de portes, lunettes arrières et autres toits vitrés représentaient un marché de 2 milliards d’euros en Europe la dernière année de fonctionnement du cartel. Saint-Gobain, le britannique Pilkington, le japonais Asahi et le belge Soliver en contrôlaient 90%.
A intervalles réguliers, ces quatre sociétés avaient organisé des réunions secrètes dans des aéroports et des hôtels de plusieurs villes européennes, comme Paris, Bruxelles ou Francfort. Elles s’efforçaient ainsi de maintenir leurs parts de marché respectives.
La Commission avait ouvert une enquête suite à une dénonciation anonyme, organisant notamment des perquisitions chez plusieurs producteurs en 2005.
Asahi s’est montré coopératif en fournissant des informations complémentaires, ce qui lui a valu une amende réduite de moitié: il paiera au final 113,5 millions d’euros. Pilkington devra lui s’acquitter de 370 millions et Soliver de 4,4 millions.
« Ces entreprises ont abusé l’industrie automobile et les acheteurs de voitures pendant cinq ans », a dénoncé Neelie Kroes. La Commission « ne peut et n’a pas l’intention de tolérer les comportements illicites de ce genre ».
« Les dirigeants et les actionnaires des entreprises qui portent préjudice aux consommateurs et à l’industrie européenne doivent l’apprendre à leurs dépens: s’ils trichent, ils se verront infliger de lourdes amendes. »
Neelie Kroes a fait de la lutte contre les cartels une de ses priorités, avec des mises à l’index dans des secteurs aussi variés que la paraffine, les bananes ou le caoutchouc synthétique, et des amendes de plus en plus lourdes.
En incluant la décision de mercredi, la Commission a déjà épinglé cette année sept cartels pour des amendes totales de 2,3 milliards d’euros.
Le montant avait été de 3,3 milliards en 2007 (8 cartels dont les ascenseurs) et de 1,8 milliards en 2006 (7 cartels).
Mais Bruxelles a encore de la marge. Les coupables encourent une amende pouvant atteindre 10% de leur chiffre d’affaires annuel mondial.
« L’amende de Saint-Gobain est peut-être la plus lourde jamais infligée pour un cartel, mais elle reste en dessous de cette limite », a noté Neelie Kroes.
AFP